Cass.soc., 3 mars 2015, n°13-15.551, FP+P+B:
La reprise d’une procédure disciplinaire engagée avant la signature d’une convention de rupture rétractée ultérieurement
Dans cette affaire, l’employeur convoque le salarié à un entretien préalable de licenciement le 7 juin 2010. Au cours de celui-ci, les parties signent une convention de rupture conventionnelle. Le salarié se rétracte neuf jours plus tard. Cinq jours après, l’employeur le convoque à un nouvel entretien de licenciement mais lui notifie son licenciement pour faute grave le 1er juillet 2010.
Le salarié conteste son licenciement disciplinaire. L’employeur en décidant de signer la convention de rupture avait renoncé à exercer son pouvoir disciplinaire pour les mêmes faits fautifs. Le licenciement ne pouvait pas non plus être qualifié de faute grave.
La signature d’une convention de rupture entre les parties, après que l’employeur ait engagé une procédure disciplinaire, vaut-elle renonciation à son droit de licencier le salarié pour faute grave pour les mêmes faits en cas de rétractation du salarié ?
La Cour de cassation n’est pas de cet avis, le licenciement pour faute grave était fondé et l’employeur n’était pas forclos. Elle considère que « la signature par les parties au contrat de travail d’une rupture conventionnelle, après l’engagement d’une procédure disciplinaire de licenciement, n’emporte pas renonciation par l’employeur à l’exercice de son pouvoir disciplinaire ; qu’il s’ensuit que si le salarié exerce son droit de rétractation de la rupture conventionnelle, l’employeur est fondé à reprendre la procédure disciplinaire par la convocation du salarié à un nouvel entretien préalable dans le respect des dispositions de l’article L. 1332-4 du Code du travail et à prononcer une sanction, y compris un licenciement pour faute grave. »
Commentaire :
La Cour de cassation apporte de nouvelles précisions. L’employeur peut reprendre une procédure disciplinaire déjà engagée, suite à une rétractation du salarié à la rupture conventionnelle, s’il respecte le délai de prescription des faits fautifs de deux mois. La Cour de cassation ne vise pas seulement le licenciement pour faute grave mais pour toute procédure disciplinaire, quelle que soit la sanction envisagée. Compte tenu de la définition de la faute grave, on peut être surpris que l’employeur puisse se prévaloir de la faute grave après la rétractation du salarié. En effet, la procédure de la rupture conventionnelle s’étend sur plusieurs semaines.
Il importe peu que ce soit l’employeur lui-même qui ait proposé la rupture conventionnelle. On peut se demander si la Cour de cassation adopterait la même position si c’est l’employeur qui exerçait son droit de rétractation ou en cas de refus d’homologation de la convention. Cette solution s’inscrit dans le courant actuel de la jurisprudence visant à promouvoir ce mode de rupture. La faute du salarié ne doit donc pas dissuader l’employeur de conclure une convention de rupture.
Conseil :
En cas de rétractation par le salarié de la rupture conventionnelle, l’employeur peut reprendre une procédure disciplinaire déjà engagée pour les mêmes faits fautifs. Cependant, il faut être vigilant et respecter le délai de prescription de deux mois.