Question du CE X… concernant un changement de fonction
- Un salarié devait prendre de nouvelles fonctions, celui-ci a reçu une lettre de mission sans avoir signé d’avenant à son contrat de travail. Est-il normal d’avoir une lettre de mission avant d’avoir signé un avenant au contrat de travail ?
Réponse de JURI-CE:
Une première distinction, délicate, est à faire entre la modification des fonctions, qui est une modification du contrat et un ajustement des attributions qui est un changement des conditions de travail. L’une ne s’impose pas au salarié, l’autre, si.
a) Modification des conditions de travail
Dans le cadre de son pouvoir de direction, l’employeur peut aménager les conditions d’exécution de la relation contractuelle et décider de façon unilatérale de ces modifications.
Lorsqu’il s’agit de modifications apportées à la marge, de caractère mineur, l’employeur n’est soumis à aucun formalisme particulier. Sa décision s’impose au salarié.
Il en ira ainsi d’un changement d’affectation qui maintient au salarié sa qualification et sa rémunération. Le refus par le salarié d’accomplir alors son travail dans le cadre de sa nouvelle affectation sera considéré comme fautif et passible de sanctions.
b) Modification du contrat de travail
Lorsque la modification apportée aux attributions de l’intéressé n’est plus seulement mineure et qu’elle s’avère importante, elle ne peut être imposée au salarié. Il dispose alors d’un droit de refus de la modification proposée.
Dès lors un avenant au contrat de travail est signé entre l’employeur et le salarié.
c) La période probatoire
Il arrive bien souvent que l’entreprise utilise la pratique de la période probatoire en cas de changement de poste.
Celle-ci a pour seul effet de replacer le salarié dans ses fonctions antérieures, en cas d’échec lors de la prise de nouvelles fonctions. La période probatoire en cours d’exécution du contrat de travail nécessite l’accord exprès du salarié. Une déclaration verbale ne suffit pas à établir l’existence d’une période probatoire dûment acceptée.
En l’absence d’accord écrit, le salarié peut soutenir que sa réaffectation constitue une modification unilatérale du contrat de travail et refuser de revenir à son ancien poste (Cass. soc., 16 mai 2012, n°10-10.623).
L’organisation et les structures que se donne l’entreprise ne peuvent pas faire échec à ce principe.
La période probatoire doit en principe débuter à la date à laquelle le salarié prend effectivement ses nouvelles fonctions, même si la Cour de cassation semble tolérer qu’un léger décalage puisse néanmoins intervenir en fonction des circonstances (Cass. soc., 20 mai 2015, n°13-13.967).
Au regard des éléments précédents, il apparaît que si le salarié est effectivement dans la situation d’un changement de fonction entraînant une modification de son contrat de travail, il aurait dû signer un avenant à son contrat de travail, et il aurait eu le droit de refuser ce changement.
En outre, si l’employeur venait à soutenir que le salarié est en période probatoire, comme c’est souvent le cas en pratique, celle-ci ne peut en aucun cas être opposée au salarié dès lors qu’aucun document en ce sens n’a été conclu entre les deux parties.
Ainsi, le salarié peut valablement aujourd’hui considérer que son changement de fonctions est effectif, et il ne sera pas possible de le faire revenir à ses fonctions antérieures.
Il pourrait, en outre, demander les changements relatifs à ses nouvelles fonctions (statut, rémunération…).