JURI-CE

Les heures de délégation en entreprise – fiche pratique

 

Les heures de délégation sont payées comme temps de travail effectif, avec la paie correspondante, mais sans que le bulletin de salaire en fasse mention. Elles sont attribuées par mois civil, c’est-à-dire du 1er au dernier jour du mois, quel que soit le nombre de jours travaillés dans le mois considéré. Un salarié présent quelques jours seulement dans le mois a le droit d’utiliser l’intégralité de son crédit d’heures. Il en est ainsi même en cas d’absence pour congés payés, maladie, désignation ou élection au cours du mois, etc. Toutefois la réélection au cours d’un mois ne double pas le crédit d’heures.

Le crédit mensuel doit être utilisé mensuellement. En conséquence, les heures non prises ne sont pas reportées le mois suivant.

Sauf accord ou usage plus favorable, un élu suppléant ne peut bénéficier du crédit d’heures non utilisé qu’en cas de remplacement du titulaire du titulaire. Le représentant du personnel est libre d’utiliser à sa guise son crédit d’heures. Il peut, selon ses besoins, regrouper ses heures pour une utilisation globale ou, au contraire, fractionner son crédit autant de fois que nécessaire.

 

 

En principe, le crédit d’heures est attribué individuellement à chaque représentant et ne peut donc être réparti librement entre eux. Cette règle est intangible en ce qui concerne les élus DP, et les membres du CE. La faculté n’étant pas prévue par la loi, les juges estiment, en effet, qu’elle porte atteinte au libre exercice de mandat du titulaire. Il s’ensuit qu’un usage ou un accord ne peut prévoir cette libre répartition entre titulaires ou entre titulaires et suppléants.

Bon à savoir: La loi Rebsamen sur le dialogue sociale du 17 août 2015 a prévu des modifications pour la nouvelle délégation unique du personnel (DUP). En effet, la nouvelle loi permet la mutualisation des heures de délégations. Les membres titulaires de la DUP peuvent, chaque mois, répartir entre eux et avec les membres suppléants le crédit d’heures dont ils disposent. Cette mutualisation est librement organisée par les élus à condition d’en avertir l’employeur. Une limite est toutefois posée: un représentant du personnel ne pouvant utiliser, dans le mois, plus d’une fois et demie le crédit d’heures de délégation dont il bénéficie. Autre nouveauté, l’annualisation du temps de délégation, c’est-à-dire l’utilisation cumulative des heures de délégation dans la limite de 12 mois. Là encore le dispositif est limité au cumul mensuel maximum d’une fois et demie le crédit d’heures d’un membre titulaire.

 

Quand il existe plusieurs délégués syndicaux d’entreprise ou d’établissement dans une même section syndicale, ceux-ci peuvent répartir entre eux le temps dont ils disposent, à condition que l’employeur en soit informé. Cette possibilité n’est toutefois pas étendue au délégué syndical central (cass. soc. 3 mars 1993, n°89-43.497).

Les délégués désignés ou élus en application d’une convention collective ou d’un accord plus avantageux que la loi disposent du crédit prévu conventionnellement. A défaut, il y a lieu de se référer au crédit, prévu par la loi pour la tranche d’effectif la plus proche (circ. min. 25 octobre 1983).

 

 

Les dépassements non justifiés par des circonstances exceptionnelles, peuvent être payées en vertu d’un accord (de branche ou d’entreprise) ou s’il existe un usage dans l’entreprise en ce sens. De tels usages sont fréquents. Comme les accords collectifs, ils peuvent être à l’origine d’avantages supérieurs à la loi. Un employeur ne peut pas les remettre en cause brusquement. En effet, l’accord tacite qui les consacre est nécessairement intervenu dans l’intérêt du bon fonctionnement de l’institution représentative du personnel, à partir des besoins et des possibilités de l’entreprise.

L’accord collectif peut porter sur une augmentation du crédit légal, ou son attribution plus large, pour des personnes n’en disposant pas légalement (ex : des suppléants) ou par aménagement des conditions d’utilisation, abaissement des seuils d’effectifs minimums, etc. Un usage est établi lorsque l’engagement de l’employeur est constant, général et fixe.

En cas de dépassements répétés, les représentants du personnel doivent être prudents. En effet, il a été jugé que le membre du CE qui continue à dépasser de façon importante son crédit légal, malgré des avertissements écrits de l’employeur, commet une faute d’une gravité suffisante justifiant son licenciement car il n’a pas justifié de circonstances exceptionnelles liées à l’exercice de son mandat (cons. Et. 17 décembre 1993 n°11653).

 

 

La liberté d’exercice des fonctions n’est pas toujours subordonnée au paiement des heures de délégation. Un dépassement non payé peut être licite s’il n’y pas d’abus, car la loi ne fixe que le cadre légal du paiement. En effet, un représentant du personnel doit pouvoir exercer sa mission s’il ne dispose plus de temps légalement payé et s’il ne peut pas invoquer les circonstances exceptionnelles. Il en est ainsi quand le dépassement est nécessaire pour le bon fonctionnement des institutions.

Toutefois, lorsqu’un dépassement important non justifié par des circonstances exceptionnelles est prévisible, l’intéressé peut demander à l’employeur une autorisation d’absence non rémunérée. De telles autorisations peuvent être négociées. Elles sont fréquentes en pratique et elles évitent les litiges ultérieurs.

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