Modification du contrat de travail et changement de secteur géographique

Conseil d’État, 23 décembre 2014, 364 616

Le changement de secteur géographique s’analyse en une modification du contrat, peu importe qu’il n’implique pas de changement de résidence ni d’aggravation de ses conditions de travail.

Selon l’article L 1221-1 du code du travail, le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun des contrats : l’article 1134 du code civil tenant à la force obligatoire des contrats trouve à s’appliquer. En conséquence le contrat s’impose aux parties, tel qu’il a été conclu. D’un côté, le chef d’entreprise peut vouloir faire évoluer la relation de travail en fonction des besoins de son activité. De l’autre, on comprend que le salarié puisse refuser de voir son contrat de travail modifié. Les situations de modifications de contrat se déplacent sur le terrain de la rupture du contrat.

La jurisprudence a posé deux lignes directrices :

– il existe les simples changements des conditions de travail qui relèvent du pouvoir de direction de l’employeur : il peut prendre des décisions unilatérales relatives à l’organisation du travail au sein de son entreprise.

– il existe des modifications contractuelles qui relèvent de l’article 1134 du code civil que l’employeur ne peut imposer au salarié.

S’agissant du lieu de travail, la cour de cassation n’a jamais considéré qu’il constituait un élément du contrat de travail. Depuis un arrêt de principe du 4 mai 1999, c’est au secteur géographique qu’il convient de se référer pour savoir si on est en présence d’une modification contraire ou d’un simple changement des conditions de travail.

En l’espèce, une entreprise avait informé un salarié protégé du changement de sa zone de prospection. Le salarié avait refusé le changement de sa zone géographique d’affectation, et l’entreprise l’a licencié pour faute au motif qu’il n’aurait pas effectué son travail et aurait eu de nombreuses absences injustifiées. L’inspectrice du travail avait autorisé le licenciement. Le ministre du travail avait annulé cette décision et considéré que le refus du changement de secteur géographique ne constituait pas une faute. Le tribunal administratif a confirmé cette décision mais la cour d’appel de Paris le 18 octobre 2012 avait infirmé le jugement en autorisant le licenciement. Les juges avaient en effet considéré qu’aucune mention de secteur géographique ne figurait dans le contrat, que l’intéressé n’avait pas changé de résidence et que ses conditions de travail n’étaient pas aggravées.  Le salarié a formé un pourvoi devant le Conseil d’État.

Les juges ont annulé la décision de la cour administrative d’appel en indiquant que le seul critère du changement ou non de secteur géographique déterminait s’il s’agissait d’une modification contractuelle que le salarié est en droit de refuser ou d’un changement des conditions de travail que l’employeur peut imposer. Le Conseil d’État constate dans cette décision que le nouveau lieu de travail se situait dans un secteur géographique différent de l’ancien. L’accord du salarié était indispensable.

Le Conseil d’État confirme la jurisprudence de la Cour de cassation. Ainsi celle-ci avait déjà décidé que les considérations personnelles sont inopérantes dans le débat, le changement de lieu de travail s’appréciant de façon objective.

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