CAA PARIS, 24 novembre 2014, (N°13PA02876, 13PA03275, 13PA03287, 13PA03274, 13PA0376)

 

Validation de la liste des organisations syndicales représentatives au niveau national

 

La requête de FO visant l’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté du 30 mai 2013 fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel est rejetée par la Cour administrative d’appel de Paris. Elle a également validé, le même jour, quatre arrêtés sur la représentativité de branche.

L’opposition de Force Ouvrière à la loi du 20 août 2008, qui a modifié les règles de la représentativité syndicale, l’aura conduit successivement à saisir le Conseil constitutionnel, la Cour de cassation, l’Organisation internationale du travail, et récemment la Cour administrative d’appel de Paris. En vain à chaque fois, car a loi du 20 août 2008 et les résultats qu’elle a engendrés ne vacillent pas .

Aux termes de l’article L. 2122-9 du Code du travail, sont représentatives au niveau national et interprofessionnel les organisations syndicales :

  • qui satisfont aux critères de représentativité
  • qui sont représentatives à la fois dans des branches de l’industrie, de la construction, du commerce et des services
  • et qui ont recueilli au moins 8 % des suffrages exprimés lors d’un premier cycle électoral ouvert après la loi de 2008.

 

Cette première mesure nationale de l’audience électorale des organisations syndicales résulte de l’agrégation :

  • d’une part, des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles qui se sont tenues dans les entreprises de plus de onze salariés entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012
  • d’autre part, des résultats du scrutin sur sigle organisé pour les entreprises de moins de onze salariés qui s’est déroulé entre le 28 novembre et le 12 décembre 2012
  • et, enfin, les résultats des élections aux chambres départementales d’agriculture (janvier 2013).

Les résultats ont été proclamés le 29 mars 2013. Sur la base de résultats consolidés, le ministre du Travail a adopté le 30 mai 2013 l’arrêté contesté par le syndicat FO.

En attendant les résultats du prochain cycle électoral qui dure quatre ans, la situation est claire : cinq organisations syndicales sont représentatives au niveau national et interprofessionnel, et sont confortées par l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris : la CGT, la CFDT, la CFE-CGC, la CFTC et… FO qui pèse 18,28 % pour la négociation des accords  collectifs à ce niveau.

Ce sont les mêmes qu’au  temps de la représentativité présumée avec la loi de 1966.

La Cour administrative d’appel de Paris, a finalement rendu son verdict le 24 novembre 2014, réfutant l’ensemble des points soulevés par la confédération.

Tout d’abord, afin de traiter les procès-verbaux d’élections professionnelles transmis par les entreprises de plus de onze salariés, l’administration a mis en place le système MARS (mesure de l’audience de la représentativité syndicale), centre de traitement qui collecte, saisit les procès-verbaux d’élections et traite les erreurs via une procédure validée par les partenaires sociaux.

Le syndicat FO faisait observer d’une part, que les règles de gestion élaborées pour le traitement des données n’avaient pas été élaborées en début de cycle, d’autre part, que le système avait fait l’objet d’une attaque informatique, enfin, que beaucoup trop de PV comportaient des anomalies.

 

La cour administrative d’appel balaie ces trois arguments :

  • S’agissant du premier, elle rappelle que les règles de fonctionnement liées à MARS « n’ont pas porté sur l’organisation et le déroulement des élections professionnelles dans les entreprises mais uniquement sur les modalités de traitement des informations issues de ces élections n’ont pu avoir d’influence sur le vote des salariés au cours de la période considérée, ni sur la stratégie électorale des organisations syndicales dans l’entreprise ». Par conséquent, « la circonstance que ces règles de gestion élaborées pour le traitement des données n’avaient pas été arrêtées en début de cycle n’a porté aucune atteinte à la fiabilité des résultats ».
  • Sur l’attaque informatique dont a fait l’objet le système en février 2012, il ressort des pièces du dossier qu’elle « n’a eu aucune incidence sur l’intégrité et la sécurité du système de mesure de l’audience de la représentativité syndicale, ainsi que l’ont constaté les responsables de la sécurité informatique du ministère chargé du travail dès mars 2012 ; que, si l’administration a, par ailleurs, à la demande du Haut conseil du dialogue social, confié un audit à l’agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, le ministre a pu légalement prendre son arrêté du 30 mai 2013 sans attendre les résultats de cet audit, qui a du reste ultérieurement confirmé l’absence de toute atteinte au système MARS ».
  • Les anomalies relevées sur les procès-verbaux empêchaient-elles de procéder à une mesure de l’audience syndicale dans les branches professionnelles et au niveau national et interprofessionnel ? Là encore, la cour d’appel écarte l’argument. « L’administration a, d’une part, mené des actions de sensibilisation auprès des entreprises à cet égard, d’autre part, pris des mesures aux fins de collecter les procès-verbaux manquants et, enfin, mis en place une procédure de contrôle des procès-verbaux et de corrections des anomalies ». Les actions menées par l’administration ont permis de ramener le taux d’anomalie qui était à l’origine de 70 %, à moins de 10 %. Par conséquent, il n’est pas démontré que les données recueillies et consolidées par l’administration n’ont pas été « exhaustives et fiables ».

 

La Cour administrative d’appel de Paris rappelle aussi que le juge administratif n’est pas le juge de l’élection et qu’il s’est toujours refusé à contrôler la régularité des actes qui ne sont pas détachables des opérations électorales par la voie de l’exception d’illégalité. Une décision récente du Conseil d’État en témoigne : « Considérant qu’il résulte de l’article L. 2122-10-5 du Code du travail que les contestations relatives à l’inscription sur ces listes électorales relèvent du juge judiciaire ; qu’à supposer même que, comme le soutiennent les requérants, le nombre important de décisions identiques concernant les salariés en cause révèle l’existence d’une décision par laquelle le ministre du travail aurait estimé que les entreprises qui les emploient relèvent de la convention collective nationale de la production cinématographique, une telle décision serait dépourvue de caractère réglementaire. » (CE, 25 oct. 2012, no 363.495, Association des producteurs de cinéma).

S’agissant des élections dans les entreprises de moins de onze salariés, l’article R. 2122-93 fixe un délai de recours contentieux de quinze jours à compter de l’affichage des résultats. Cette contestation relève du juge judiciaire (C. trav., art. 2122-10-11). Or, relève la cour d’appel, « ni la désignation des électeurs pour le scrutin qui s’est déroulé du 28 novembre au 12 décembre 2012 […], ni le scrutin lui-même, n’ont fait l’objet d’une contestation devant le juge de l’élection dans les délais impartis ».

S’agissant des élections qui se sont tenues dans les entreprises de plus de onze salariés, la cour d’appel le rappelle encore une fois : « les moyens tirés du défaut d’organisation d’élections dans des entreprises de plus de dix salariés ou de l’existence d’irrégularités lors de la négociation du protocole préélectoral, qui relèvent du juge de l’élection, sont sans portée utile dans le présent contentieux. ».

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