Décision de la cour de Cassation apportant des précisions sur la délégation de pouvoirs
cass. crim. 08/09/2015, n°14-83.053:
Un gérant de société poursuivi pour infraction aux règles sur la sécurité des travailleurs ne peut pas échapper à sa responsabilité pénale en invoquant une délégation de pouvoirs concernant la signalisation du chantier et non le domaine de la sécurité.
En principe tenu de veiller personnellement à la stricte et constante application dans l’entreprise des règles en matière de sécurité des travailleurs , le chef d’entreprise peut déléguer ses pouvoirs en la matière à un préposé pourvu de l’autorité, de la compétence et des moyens nécessaires pour mener à bien cette mission. En cas d’infraction à ces règles c’est alors le délégataire qui en sera tenu pénalement responsable.
Encore faut-il qu’il n’y ait aucune ambiguïté sur l’objet et l’étendue de la délégation consentie par le chef d’entreprise. Il importe en effet que le délégataire soit précisément informé de sa mission et des obligations qui en résultent.
Ainsi, la validité de la délégation de pouvoirs suppose que les conditions cumulatives suivantes soient réunies :
- Le délégataire est obligatoirement un salarié de l’entreprise
- Il doit faire partie du personnel d’encadrement
- Il doit expressément accepter la délégation (un écrit est requis)
- Il doit avoir l’autorité, la compétence et les moyens nécessaires.
En l’espèce, le gérant d’une société de travaux publics, poursuivi à la suite d’un accident du travail pour blessures involontaires et infractions à la réglementation sur la sécurité des travailleurs, invoquait une délégation de pouvoirs consentie à un directeur de travaux. Celle-ci portait sur l’application des règles en matière économique et commerciale, en matière de signalisation de chantiers et dans certains domaines relevant du droit social tels que l’embauche et la détermination des conditions de travail.
Les juges du fond, dont la décision est approuvée par la Cour de cassation, ont considéré que cette délégation ne pouvait pas l’exonérer de sa responsabilité pénale : d’une part, le domaine de la signalisation des chantiers ne recouvrait pas celui de la sécurité des travailleurs ; d’autre part, l’argument du gérant selon lequel la délégation en matière de signalisation des chantiers avait été de fait étendue aux questions de sécurité par la convention collective des travaux publics ne pouvait pas être accueilli car la clause conventionnelle invoquée, décrivant de façon générale l’activité de management, était imprécise.
30 novembre, 2015