Abus de la liberté d’expression du salarié constitutif d’une faute

 

Cass. soc. 3 décembre 2014 n°13-20.501

 

Maître F., avocat salarié d’un cabinet rennais, est reçu par une des associés sur des dossiers qu’il a en charge, et où il a été constaté un manque de rigueur. Par la suite, son employeur lui adresse un courrier recommandé au terme duquel il lui est demandé de fournir un travail de qualité et d’une rigueur irréprochable. Le salarié répond à ce courrier en qualifiant l’entretien de « guet-apens » assimilable à des faits de harcèlement moral. Un nouvel échange de courrier entre l’employeur et le salarié a lieu, à l’issue duquel l’employé est convoqué à la médecine du travail et déclaré apte. L’employeur fait part de sa décision de licenciement pour faute grave du salarié « aux motifs suivants : accusations de malhonnêteté et  mises en cause des qualités professionnelles et managériales de votre employeur transmises au Bâtonnier, à l’inspection du travail et au médecin du travail ».

Le salarié saisit le Bâtonnier en vue de faire requalifier son licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le Bâtonnier ne lui donne pas raison, le salarié ayant abusé de son droit à la liberté d’expression en proférant des accusations de malhonnêteté et d’incompétence à l’égard de son employeur et en ayant fait publicité de ces accusations à des tiers. La cour d’appel confirme la sentence arbitrale du Bâtonnier. Le salarié se pourvoit en cassation, alléguant que les juges du fond n’ont pas « recherché si la teneur des écrits imputés à Me F n’était pas proportionnée à la gravité des attaques de son employeur » et se sont bornés « à énoncer que les écrits de M. F constituaient manifestement une réaction excessive ».

La Haute juridiction ne suit pas le demandeur au pourvoi. Elle indique que « le salarié avait été licencié pour avoir porté des accusations d’incompétence et de malhonnêteté contre son employeur dans des termes virulents et excessifs, que n’appelaient pas la lettre de l’employeur à laquelle il répondait, et constaté que le salarié en avait assuré une publicité en transmettant à des tiers, la cour d’appel de Rennes, […] a caractérisé un abus de la liberté d’expression constitutif d’une faute ».

Cet arrêt n’est  qu’une confirmation de jurisprudence constante ; la cour ayant déjà indiqué que si le salarié abuse de sa liberté d’expression par des propos diffamatoires et excessifs, il encoure une sanction disciplinaire, presque toujours un licenciement[1].

[1]Cass. soc. 07.10.1997 n°93-41.747 ; Cass. soc. 30.10.2002 n°00-40.868

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