Arrêt de la Cour de Cassation du 24 juin 2014, n°13-13.609

 

L’impartialité de la juridiction remise en question lorsque l’une des parties exerce les fonctions de défenseur syndical

 

L’essentiel : Le fait qu’une partie exerce habituellement les fonctions de défenseur syndical devant une juridiction est de nature à créer un doute sur l’impartialité objective de cette juridiction.

En l’espèce, une salariée avait déposé une requête devant le conseil de prud’hommes de Saint-Denis de la Réunion, aux fins d’obtenir l’annulation d’une sanction disciplinaire prononcée à son encontre. L’employeur avait alors demandé le renvoi de l’affaire devant une autre juridiction en invoquant la suspicion légitime liée aux fonctions de défenseur syndical occupées par la salariée devant ce conseil de prud’hommes.
Pour écarter cette requête, la cour d’appel retient que le seul fait que la salariée, partie dans le litige, dispose, par ailleurs, de la qualité de défenseur de salariés la mettant en contact régulier avec les membres des conseils de prud’hommes et qu’elle soit affiliée à la même organisation syndicale que certains conseillers prud’hommes de la section appelée à statuer sur le litige en cours n’est pas un élément de nature à remettre en cause l’impartialité des conseillers relevant de la même organisation syndicale, mais aussi de l’ensemble des membres de la section, et n’est par conséquent pas de nature à justifier, à lui seul, le renvoi de l’affaire devant une autre juridiction pour cause de suspicion légitime.
La cour ajoute qu’il n’est justifié, par ailleurs, d’aucun élément objectif permettant de supposer que la présence régulière et l’activité que le défenseur de salariés concerné par le litige a pu déployer devant les juridictions prud’homales, jusqu’à ce jour, serait propre à exercer une influence déterminante sur l’opinion des membres composant le conseil devant connaître de l’affaire et de la solution à lui apporter, alors qu’il s’agit d’une juridiction devant laquelle l’exigence d’impartialité est d’abord assurée par le paritarisme.
La salariée s’était alors pourvue en cassation.

Il avait été jugé que le seul fait qu’une des parties au procès appartienne à la même organisation syndicale que l’un des conseillers prud’hommes n’est pas de nature à affecter l’impartialité de la juridiction –cass. soc. 19 décembre 2003, n°02-41.429).
Mais la Haute juridiction casse l’arrêt d’appel au visa de l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, en précisant, de manière inédite, que le fait qu’une partie exerce habituellement les fonctions de défenseur syndical devant une juridiction est de nature à créer un doute sur l’impartialité objective de cette juridiction.

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