La prééminence des candidatures déposées par la fédération syndicale

 

Cass. soc. 04/06/2014 n°13-60.238

 

Si une fédération syndicale informe l’employeur qu’il souhaite déposer une liste en lieu et place des organisations syndicales qui lui sont affiliées, et que ces mêmes organisations déposent par la suite une liste, l’employeur peut refuser les listes présentées par ces syndicats sans avoir besoin de saisir le juge s’instance

 

Progressivement, la Cour de cassation livre sa conception des liens existant entre, d’une part, une confédération, une fédération ou une union et, d’autre part, les syndicats adhérents. De nombreux arrêts ont déjà montré que ces confédérations, fédérations et unions jouissent de tous les droits conférés aux syndicats professionnels (par ex., Soc., 13 janv. 2010, n° 09-60.155 à propos de la constitution d’une section – Soc., 9 nov. 2011, n° 11-11.007 et 11-60.074 à propos de la désignation d’un représentant de la section syndicale. 184).Dans l’affaire présente, le conflit s’est porté sur la paternité des candidatures que l’employeur est en droit d’accepter. Il s’agissait de savoir :- qui, de la fédération ou des syndicats adhérents, disposait du pouvoir de déposer ces candidatures-  lorsque la fédération présente des candidats différents de ceux des syndicats adhérents, l’employeur peut-il ne retenir que les premiers

Deux voies s’offraient à la Cour de cassation :

– soit, par application du principe de neutralité de l’employeur dans son rôle d’organisateur des élections, elle lui imposait d’accepter toutes les candidatures, quitte à saisir le tribunal en vue d’un départage

– soit elle acceptait l’idée que, en adhérant à une union, une fédération ou une confédération, un syndicat s’inscrit dans une démarche de fidélité à l’égard de la politique de son groupement fédératif : elle pouvait alors en déduire l’existence d’un pouvoir de direction entre les protagonistes et accepter qu’un employeur fasse prévaloir les candidatures du groupement fédératif sur celles des syndicats adhérents.

La Cour de cassation a fait prévaloir la seconde solution. Mais la décision n’allait pas de soi, en raison du risque pénal encouru par l’employeur sur le fondement du délit d’entrave.

Traditionnellement, l’employeur ne peut refuser d’enregistrer des candidatures que si le dépôt de la liste est tardif au regard des dispositions du protocole préélectoral (Soc., 16 mai 1990, n° 89-60.002 – Soc., 29 mars 1994, n° 93-60.360). En dehors de cette hypothèse, il ne lui appartient pas de trancher les contestations relatives à l’éligibilité des candidats, quel que soit le motif invoqué (Soc., 7 janv. 1998, n° 97-60.301). S’il entend contester une candidature, il doit saisir le juge d’instance (Soc., 13 juill. 1993, n° 92-60.117) et peut, dans l’attente de la décision judiciaire, reporter la date du premier tour de scrutin (Soc., 24 janv. 1995, n° 94-60.084).

En réalité, ces questions de concurrence entre syndicats sont peu éloignées de celles qui existent entre un délégué syndical et son syndicat, ou entre la section syndicale et le syndicat (Soc., 30 mai 2001, n° 00-60.159). Il est de jurisprudence constante que seule la personne du syndicat est titulaire du pouvoir de présenter, modifier ou retirer une liste ( Soc., 8 nov. 1988, n° 88-60.009).

La Cour de cassation a donc repris cette logique dans les rapports entre le groupement fédératif et les syndicats adhérents, dès lors que l’employeur a été informé de la position du premier. Cette solution est même conforme à l’impératif de sécurité juridique, car elle permet d’éviter les risques de contentieux qui ne manqueraient pas de se présenter si l’employeur était dans l’obligation d’enregistrer toutes les listes.

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